Les attentats terroristes, de début janvier, ont obligé l'ensemble des français à s'interroger sur la liberté d'expression et sur la liberté de la presse. L'ignorance, l'incompréhension des valeurs qui fondent notre société et doivent nous permettre de vivre ensemble malgré nos différence sont une des causes de ces évènements mais aussi de ceux qui les ont précédés et suivis. La lutte contre ces deux maux passera par l'école mais aussi par l'information que diffuse la presse généraliste. Or de nombreux français n'ont pas accès à ce média. La fiscalité permet de favoriser les politiques publiques importantes, la natalité, l'écologie, l'entraide intergénérationnelle. Elle pourrait être aujourd'hui utile pour réduire les inégalités en termes de compréhension du monde auquel nous participons. 

 

Notre pays vient de connaitre, en quelques jours, avec les meurtres perpétrés contre des journalistes de Charlie Hebdo, des policiers et des membres de la  communauté juive, une agression sans précédents. Ces actes terroristes nous ont rappelé que la liberté d’expression et les symboles de la république, liberté, égalité, fraternité sont les principaux attributs d’une démocratie et que les attaques menées contre eux peuvent la faire, à tout moment, vaciller. Les rassemblements, tout au long de la semaine, ont montré que les français peuvent se battre et se mobiliser pour la préserver.

 

Les prochaines semaines, les prochains mois proposeront des solutions pour protéger la démocratie et lutter contre les forces qui tentent, et pas seulement en France, de la déstabiliser. Les maux sont multiples et les remèdes seront divers et complexes à mettre en œuvre, le renforcement de la sécurité intérieure et extérieure, la lutte contre l’exclusion, le chômage, l’affermissement du rôle de l’école. L’un des maux les plus emblématiques reste l’Ignorance, la méconnaissance de l’autre, du monde qui nous entoure, des enjeux de nos sociétés, de nos Histoires.

 

Tout au long de la semaine, les différents intervenants, citoyens, hommes politiques, journalistes, spécialistes se sont accordés pour défendre la liberté d’expression et la liberté de la presse. La presse est l’une des institutions qui luttent contre l’ignorance et participe de notre pensée commune. C’est un instrument de la connaissance, tout comme l’école, les bibliothèques, l’accès à internet mais combien de français achètent régulièrement un journal  de la presse généraliste ? La question est même : combien peuvent s’offrir régulièrement un journal ?

 

Le massacre dans les locaux de Charlie Hebdo a entrainé une vague d’abonnements pour sauver le journal. Cela reste cependant, même si il est nécessaire et important, un épiphénomène car cela ne favorisera pas l’accès à l’information. Lire un journal régulièrement, c’est s’imposer une réflexion intellectuelle sur des sujets d’actualité, quels qu’ils soient, traités par des personnes dont c’est le métier, les journalistes, et qui nous permet de lutter contre notre ignorance, nos préjugés ou nos peurs. Cette lecture régulière c’est aussi favoriser et nous entrainer à une  réflexion personnelle. Un journal, c’est une ouverture vers la connaissance, vers la compréhension du monde qui nous entoure et des personnes qui le composent.  

 

Beaucoup semblent en convenir, la presse et la liberté d’expression qui y est attachée sont d’intérêt général parce qu’ils permettent de lutter contre l’ignorance qui oppose des personnes ou des entités et mènent aux actes terroristes subis cette semaine mais aussi aux agressions qu’ont dû déplorer des lieux de culte et la communauté musulmane ou encore aux tensions entre communautés et groupes ressentis ces dernières années.

 

Un organisme reconnu d’utilité publique gère un patrimoine dans l’intérêt général. La presse généraliste gère un patrimoine, la connaissance et la compréhension de la société qui nous entoure dans l’intérêt général et plus particulièrement celui de nos démocraties et de ses citoyens.

Les dons qui seront faits dans les prochains jours pour garantir la survie de Charlie Hebdo permettront aux donateurs de bénéficier d’une réduction d’impôt à hauteur de 66% du montant de leur versement.

 

Pour que le maximum de français ait accès à la presse généraliste, la fiscalité, mécanisme de redistribution, en l’occurrence pour la connaissance et contre l’ignorance, doit permettre à chaque ménage d’obtenir une réduction d’impôt, à hauteur de 66%, pour un abonnement à un titre de la presse généraliste papier ou numérique. Pour exemple, un abonnement annuel à un titre régional de 300 euros, ne reviendrait à un ménage qu’à 100 euros par an ou 8,3 euros par mois au lieu de 25. La presse généraliste, nationale et régionale, et le savoir qu’elle diffuse sont au moins aussi importants, pour nous et nos enfants, que leur garde, leur scolarisation ou l’amélioration de nos habitats.

 

Cette mesure sera complexe à mettre en œuvre, de par le choix des titres qui pourront être retenus, du choix des bénéficiaires, ménages et/ou entreprises, jeunes rattachés au foyer fiscal des parents, sa durée ou encore de la distorsion de concurrence que cela pourrait entrainer entre les sociétés de presse. Mais c’est aussi un choix fort dans la lutte contre l’ignorance et ses conséquences futures. Nous n’éradiquerons pas l’ignorance et nous n’empêcherons pas les actes qui s’appuient sur elle, seulement en favorisant l’accès à la presse par le plus grand nombre, mais cela y participera.

 

Monsieur le Premier Ministre, mesdames et messieurs les parlementaires, proposez et votez lors du prochain projet de loi de finances rectificative une mesure en ce sens. Cela aura un coût mais participera des mesures nécessaires à la défense de la démocratie.  

 

Jean-Christophe Savineau

Ingénieur de recherche Université François Rabelais

Membre du laboratoire CEREGE IAE de Poitiers

Membre du groupe de recherche « Démocratie et Finances publiques » de Fondafip

×